Le cardinal Bergoglio est connu pour ses qualités d’homme de dialogue. C’est en tout cas ce qu’affirme un nombre impressionnant de représentants d’Eglises orthodoxes et protestantes en Argentine. On ne compte plus les pasteurs qui n’ont pas de mots assez chaleureux à l’égard du nouveau pape. Et les commentaires les plus encourageants viennent sans doute des… évangéliques (au moins 10% des Argentins). Ce qui est une information en soi, car il règne parfois une franche incompréhension entre catholiques et évangéliques en Amérique latine, les uns et les autres se traitant régulièrement de « sectaires » et « idolâtres » et ceci dans un contexte de concurrence.
Ainsi Juan Pablo Bongarra, président de la Société biblique argentine. Il se souvient du cardinal Bergoglio participant récemment à une prière organisée par des Eglises charismatiques à Buenos Aires. « Il s’est agenouillé devant 6000 personnes, et les pasteurs protestants ont prié pour lui en imposant leurs mains », raconte-t-il à un journaliste de Christianity Today, mensuel américain. « Son élection a été une réponse à nos prières (…) Sa priorité est l’unité au niveau des gens », dit carrément Norberto Saracco, un des pasteurs évangéliques les plus écoutés en Argentine. A retenir aussi, le plaidoyer impressionnant pour le pape François du pasteur Luis Palau, né en Argentine et installé aux Etats-Unis, l’un des évangélistes les plus connus dans les Amériques. Dans cette interview, il explique que François impose le respect grâce à son style de vie chrétien, son respect pour les autres et le fait qu’il va vraiment à la rencontre des gens.
Côté anglican, même son de cloche. Pour Greg Venables, évêque anglican, le nouveau pape est « davantage un chrétien, centré sur le Christ et rempli par l’Esprit, que seulement un homme d’Eglise. Il croit à la Bible telle qu’elle est écrite (…). Il est toujours humble et sage… ». Selon Greg Venables, le cardinal Bergoglio lui aurait même dit que la création de l’ordinariat catholique pour les anciens anglicans « n’était pas nécessaire et que l’Eglise a besoin des anglicans » !
Un article dans l’hebdomadaire Réforme va dans le même sens, en insistant sur les espoirs de dialogue suscités par le nouveau pape. Olav Fykse Tveit, secrétaire général du Conseil œcuménique des Eglises espère qu’« il fera de l’unité de tous les chrétiens l’une de ses priorités ». Et Setri Nyomi, secrétaire général de l’Alliance réformée mondiale (ARM), espère qu’il fera accélérer le dialogue œcuménique : « Depuis le document Dominus Iesus de 2000, Rome a abandonné les engagements de Vatican II. J’espère que le pape François va relancer l’effort », dit-elle, sans que l’article précise ces propos.
Pour l’instant, les seuls bémols hautement prévisibles concernent les rapports entre certaines Eglises protestantes libérales – luthériennes notamment, et l’Eglise catholique sur des sujets de société. Elles ne vont pas être d’accord sur le mariage gay, par exemple, ni sur les « dangers de la sécularisation », selon l’expression du nouveau pape. Ce dernier s’est déjà illustré en Argentine comme un opposant au mariage gay et à la sécularisation. Et en cette matière, il aura des alliés chez les évangéliques et chez beaucoup d’anglicans, mais pas forcément chez les luthériens et les réformés, notamment en Occident.