Alors que le chantier de l’Église évangélique de Langeais accuse plusieurs mois de retard, la communauté s’active déjà pour préparer la relève. Reportage.
Mercredi matin, 10 h, à un jet de pierre du château de Langeais. L’ancienne salle de bal de la rue Anne-de-Bretagne n’a pas encore officiellement démarré sa nouvelle vie d’Église évangélique. Mais la relève est déjà là, en plein cours d’herméneutique, dans la salle qui jouxte le chantier de transformation.
Attablés dans la cuisine, Thimoté, 26 ans, Tamara, 28 ans et Marina, 22 ans, ordinateurs sous les yeux, écoutent David Williamson leur enseigner l’interprétation des textes bibliques. Avec un objectif bien en tête : devenir « implanteur d’église », d’ici deux ans pour le premier, équipières dans moins d’un an, pour les deux autres.
Exactement comme Raphaël et Floriane Héritier, leurs hôtes de Langeais, issus de la première promotion du centre de formation pour pasteurs implanteurs de Loches. « Les premiers, les cobayes », s’amuse le futur pasteur de la commune, 30 ans à peine. À quelques mois du grand lancement de son lieu de culte, Raphaël Héritier a dû mettre entre parenthèses son métier de menuisier. Pour s’atteler exclusivement aux démarches administratives. Pas vraiment une sinécure, reconnaît-il, alors que le calendrier du chantier accuse plusieurs mois de retard, confronté, notamment, à la réglementation imposée par les architectes des Bâtiments de France dans le périmètre du château de Langeais. Résultat : l’inauguration, initialement prévue en octobre, a été repoussée au mois d’avril. Au mieux…
En attendant, les anciens élèves se sont déjà faits formateurs, à raison d’une ou deux journées par semaine. Enchaînant prières et démarches légales, les époux Héritier endossent aussi le rôle de baby-sitter pour les enfants des nouveaux élèves du centre de formation. « Notre but, c’est que les gens fassent partie intégrante de l’Église, qu’ils prennent le relais à leur tour », explique Floriane sur la philosophie à l’œuvre.
“ Notre but : que les gens fassent partie intégrante de l’Église ”
Restera, une fois l’Église ouverte, à atteindre 15 membres pour pouvoir se constituer en association cultuelle. Et à attendre une dizaine d’années pour voir la nouvelle venue des Églises évangéliques d’Indre-et-Loire quitter le statut d’annexe de Loches pour une autonomie pleine et entière.
« On a pu compter sur un accueil plutôt bon de la population », apprécie d’ores et déjà Raphaël Héritier. Une population, surtout « curieuse », de voir une église s’implanter dans son centre-ville, abonde Floriane. D’autant plus surprise, s’amuse la jeune femme de 25 ans, que Raphaël Anzeberger, leur ancien formateur, n’est pas vraiment passé inaperçu dans les rues de Langeais. Un pasteur qui arrive sur un long-board, « forcément, ça étonne… »
le chiffre
10.000
C’est le nombre d’habitants pour une église que souhaitent atteindre les instances représentatives évangéliques. Contre un taux de 30.000, voire 32.000 aujourd’hui. Parmi les zones qui manquent encore de lieux de culte figurent Sainte-Maure-de-Touraine, Azay-le-Rideau ou encore Montlouis-sur-Loire.
la phrase
” On n’est pas chrétien que le dimanche matin ! “
De Raphaël Héritier, pasteur de Langeais : « On n’est pas chrétien que le dimanche matin ! On vit les uns à côté des autres. L’objectif est de ne plus avoir des églises excentrées dans les zones industrielles, mais d’inverser la tendance en faisant des églises qui peuvent apporter à la vie de la ville. »
en bref
> Laïcité. Un sujet qui ne va pas sans poser quelques difficultés ou qui fâche même… Comme cette fois où les Églises de Touraine se sont vu refuser l’autorisation d’occuper un stade de Joué-lès-Tours pour un rassemblement de tous les enfants des paroisses de Touraine, rappelle Jean-Pierre Dupont, délégué départemental du Conseil national des évangéliques de France (CNEF). « La laïcité, ça signifie ne pas favoriser, ne pas subventionner tel ou tel groupe, mais pas interdire d’occuper un stade », argumente le pasteur. « La laïcité oui, mais pas une laïcité où on se replie, où on vit sa foi en cachette, chez soi. »
> Vocation sociale. Les Églises réformées gèrent très souvent des vestiaires et des banques alimentaires. L’Assemblée de Dieu, par exemple, distribue entre 180 et 200 paniers repas chaque semaine. Tandis que l’Église évangélique Baptiste propose des vêtements aux plus démunis. La Mission chrétienne du plein Évangile de Tours a quant à elle choisi de mêler les deux.
> En vidéo. « La société a tellement évolué. C’est l’occasion de proposer des choses plus actuelles. » Jusqu’aux vidéos de culte et à l’animation sur les réseaux sociaux, avance Raphaël Héritier, le pasteur de Langeais, pas à court d’idées pour faire vivre sa communauté grâce à des moyens de communication modernes…