Les pasteurs sont aux prises avec une société en mutation. Témoignages
« Le pasteur est un acteur du dialogue social »
Pour Nicolas Besson, pasteur depuis 1997 et responsable de l’office des ressources humaines de l’Eglise réformée vaudoise, le métier s’est compliqué : « Le pasteur, tout comme l’Eglise, n’est plus au milieu du village. » Aujourd’hui l’Eglise est minoritaire, il faut avoir des connaissances élargies de toutes les cultures et religions. « La société ne nous construit plus. Nous avons donc plus que jamais besoin du pasteur pour donner du sens et relier les gens dans une communauté qui s’efface. » Le pasteur « aide les gens à être plus humains en travaillant avec eux sur leur représentation du monde pour donner du sens ». Aujourd’hui, les pasteurs sont des constructeurs d’Eglise. Pour Nicolas, cela passe notamment par le leadership et une spécialisation du métier, pour « réussir à s’insérer autrement dans la société ». Dans une société plurielle, les pasteurs réformés ont donc de l’avenir : « Nous sommes contemporains par notre pluralisme et le dialogue des subjectivités. »
« Aller à la rencontre de l’autre »
« Il y a plus que jamais une demande spirituelle des gens. Pour y répondre, il faut témoigner plus profondément de l’Evangile. » Après trente-cinq ans de ministère, Pierre Genton a pris sa retraite en 2007. La clé du métier ? La prédication : « Annoncer l’Evangile avec le souci de toucher les gens en allant à l’essentiel. » Mais cela demande du travail. Ce pasteur de mai 1968 a vu le métier évoluer. Avant, le pasteur était un notable est une figure d’autorité. Il est devenu d’avantage un animateur, cherchant à mettre les gens en mouvement et à trouver leur propre voie. Pour Pierre Genton, « il faut aller à la rencontre de l’autre et être accueillant, c’est ça la gratuité de l’Evangile ». Avec le temps, le travail est donc devenu plus intense : « Se remettre en question dans une société qui évolue, c’est passionnant », se réjouit le pasteur retraité. Mais le temps manque. Pierre Genton fait encore des remplacements. « Il y a moins de paperasses et plus de temps pour aller visiter les gens et préparer des cultes », sourit-il.
Passeur de lumière
« L’humain est souvent torturé, à terre. Le pasteur amène une parole de vie : Tu es debout, tu es magnifique, unique et utile aux autres. » Passeur de lumière, c’est ainsi que Françoise Subilia, pasteur retraitée depuis six mois, voit le métier. Elevée dans une famille de pasteurs, elle en épouse un. Le métier, elle l’a vu évoluer avec son mari avant d’être consacrée en 1998. « Nous n’avons plus assez de temps pour l’essentiel, que sont les gens. » Elle déplore une structure qui prend trop de place et qui ne se préoccupe pas assez des besoins des personnes, où le contenant est plus important que le contenu. La solution ? Un plus grand respect de la part des autorités. Cette jeune retraitée avoue avoir été souvent fatiguée, mais s’être toujours réjouie de ce qu’elle faisait. « Transmettre une humanité à l’autre, sans chercher à le convaincre. » Durant son ministère, Françoise a cherché à « apaiser les gens, en rétablissant l’être debout de la Création », une quête commune à tous dans la société interreligieuse d’aujourd’hui, conclut-elle.
// M.D.