Pour remédier au fossé, réel ou fantasmé, entre science et foi, dix séminaires américains vont recevoir un total d’un million et demi de subventions. Le but recherché est d’inclure les sciences dans leur cursus de formation. C’est l’annonce faite la semaine passée par l’Association américaine pour l’avancement des sciences. Les subventions iront de 85 000 francs à 115 000 francs. Elles sont offertes par la Fondation John Templeton, qui a développé de nombreus efforts pour combler le fossé entre science et foi.
«Beaucoup de dirigeants religieux ne font pas de place aux sciences dans leur enseignement, et maintenant, ils sont en train de devenir des figures d’autorité que beaucoup de gens consultent pour toutes sortes de choses, y compris des questions qui concernent les sciences et la technologie», constate Jennifer Wiseman, directrice du département Dialogue entre science, éthique et religion de l’Association américaine pour l’avancement des sciences (AAAS).
En effet, les protestants évangéliques ont beaucoup plus tendance que les autres Américains à déclarer que quand ils ont une question d’ordre scientifique, ils se tournent vers un texte religieux, vers un responsable religieux, ou vers quelqu’un de leur congrégation.
Les séminaires sélectionnés représentent un large éventail confessionnel, démographique et géographique, dont la Scool of Divinity de Regent University (Virginie), qui inclut théologie pentecôtiste et charismatique, et la Scool of Divinity de Howards University, un séminaire à prédominance afro-américaine, à Washington DC.
Les autres séminaires concernés sont les suivants: l’Andover Newton’s Theological School (Massasussett), la Catholic University of America (Washington DC), le Columbia Theological Seminary (Géorgie), le Concordia Seminary (Missouri), le Lutheran Theological Seminary de Gettysburg (Pennsylvania), la Jesuit School of Theology de la Santa Clara University (Californie), le Multnomah Biblical Seminary (Orégon) et la School of Divinity de la Wake Forest University (Caroline du nord)
En travaillant avec l’Association des écoles de théologie, la principale organisation de coordination des séminaires américains, les mécènes ont reçu vingt-huit lettres de candidatures de la part de séminaires intéressés par le programme pilote.
Des carrefours intéressants
Les subventions vont couvrir des spécialisations, des évènements, des ressources scientifiques, la venue d’invités spéciaux et tous les coûts y relatifs. Les séminaires pourront inclure des questions de technologie moderne, de méthodologie des sciences ou d’histoire des sciences en plus des cours que les étudiants des séminaires suivent déjà, dont l’histoire de l’Eglise, éthique, accompagnement pastoral ou théologie systématique. «Pour tous ces types de cours, il y a des carrefours intéressants soit avec les sciences modernes, soit avec l’histoire des sciences ou la philosophie des sciences, et se sera précieux pour tous ces étudiants d’y être sensibilisés», a déclaré Jennifer Wisemann.
L’AAAS fournira aussi aux séminaires des ressources pédagogiques, parmi lesquelles une série de vidéos courtes d’enseignement scientifique. L’association les aidera aussi à recruter des conseillers scientifiques proches des institutions de recherche scientifique. Le nouveau projet, Science for Seminaries, va aussi organiser des conférences pour les séminaires catholiques, protestants réformés et protestants traditionnels évangéliques.
Scientifiques perçus comme hostiles à la religion
Le sondage effectué par l’AAAS laisse à penser aussi qu’il y a un conflit potentiel entre religion et science. 22% des scientifiques (et 20% du grand public) disent que les personnes qui ont des croyances religieuses sont hostiles à la science. Par contre, 22% du grand public pensent que les scientifiques sont hostiles à la religion, et parmi ceux qui estiment que religion et science sont en conflit, 52% sont du côté de la religion.
Un sondage antérieur, effectué par l’agence Associated Press (AP), a montré que l’identité religieuse, particulièrement celle des protestants évangéliques, était l’indicateur le plus tranché de scepticisme envers les questions clés de la science. Parmi les sondés, 51% des Américains adultes, dont 77% d’évangéliques, ne croient que peu ou pas du tout que «l’univers a commencé il y a 13,8 milliards d’années par un big-bang». Et 36% de l’ensemble des sondés (comparés aux 56% d’évangéliques) doutent que «la Terre soit vieille de 4,5 milliards d’années.»
Toujours selon Jennifer Wisemann, les personnes qui ont une croyance religieuse sont souvent intéressées d’apprendre comment la science peut être utilisée pour le bien commun. «C’est important d’avoir ce genre de débats, mais c’est parfois compliqué de développer la plateforme et de la structurer pour ce faire», conclut Jennifer Wisemann, «la science peut avoir un effet unificateur pour beaucoup de gens dans la société, entre des personnes qui ont la foi et d’autres qui ne partagent pas cette foi, et maintenant, au travers de ce que nous sommes en train d’apprendre dans le domaine des sciences, je pense que nous pouvons nous rassembler, afin d’utiliser cette connaissance pour le plus grand bien.»