L’Église protestante unie de France (EPUdF) a marqué d’une pierre multicolore la Journée internationale de lutte contre l’homophobie, dimanche 17 mai. Lors du synode annuel qui s’est tenu pendant trois jours à Sète (Hérault), quatre-vingt-quatorze délégués de l’EPUdF ont adopté la possibilité de bénir les couples homosexuels (trois voix contre). Désormais, les 500 pasteurs de l’EPUdF peuvent, ou non, apporter leur bénédiction à deux personnes de même sexe, mariées civilement. Près de dix-huit mois de discussions ont été nécessaires pour rendre ce geste possible.
Le Mariage pour tous comme déclic
À l’heure où des tensions sont palpables entre l’Église catholique et le gouvernement français autour de la question de l’homosexualité (*), l’Église protestante unie de France semble se démarquer et apparaître plus progressiste.
Pourtant, la décision prise dimanche a fait l’objet de nombreux débats. « Quand j’ai pris mes fonctions en 2004, la question existait déjà. Que faire si un couple de même sexe se présentait au temple pour recevoir la bénédiction ? Comment agir ? Depuis l’adoption de la loi sur le Mariage pour tous du 17 mai 2013, nos paroissiens ne savaient pas exactement la position de l’EPUdF. Cela pouvait même créer une mauvaise ambiance », se rappelle Tina Andriamialy, présidente du conseil presbytéral de l’Église protestante unie de Dijon, Beaune et Côte-d’Or.
Et d’ajouter : « Chaque confession s’était prononcée sur la question de l’union des couples homosexuels à l’époque. Aucun consensus n’avait été trouvé. La décision du synode va être, pour nous, difficile à faire accepter. Le vrai sujet désormais est l’accompagnement du couple par rapport à la parole de la Bible. Aujourd’hui, toutes les personnes, mariées civilement, peuvent recevoir la bénédiction du pasteur. »
Au-delà des discussions, qui ont conduit à la décision majoritaire du synode national, et qui témoignent de la préoccupation de bon nombre de paroissiens, c’est bien le corps religieux lui-même qui entraîne à une évolution des mentalités.
Les pasteurs, acteurs du changement
Pour Tina Andriamialy, les conseillers réunis en synode ont pris en considération les avis des pasteurs, touchés par la question : « À mon avis, le changement de génération que nous observons au sein du cœur pastoral a eu un impact sur l’approbation de la bénédiction. Nos pasteurs vivent aussi des moments difficiles, comme tous les couples, et peuvent être divorcés ou remariés. Cette bénédiction concerne tous les couples : les concubins, les divorcés, les homosexuels… »
Au temple, les premiers couples demandeurs devraient se manifester dans les jours ou les semaines à venir. « Il y a eu des échanges en amont, au sein des conseils et des régions. Le synode national, souverain, a voté. Je pense que les couples vont prendre le temps de la réflexion. De mon côté, quand il y aura des demandes, j’appliquerai la décision du synode », assure Gwenaël Boulet, pasteur de Dijon. Depuis deux ans, 17 500 couples homosexuels se sont dit « oui ». À quand le passage devant le pasteur ?
(*) Le pape François a reçu récemment le diplomate français Laurent Stefanini. Homosexuel, ce dernier a été choisi par Paris comme ambassadeur au Vatican. À ce jour, le souverain pontife ne lui a donné aucune réponse définitive sur son agrément.