Jusqu’en 1981, en Suisse, des milliers d’enfants ont été placés de force dans des familles ou des institutions (Photo:Peter Studer-Walter Studer/Keystone)
Dans les cas d’enfants placés de force, des pasteurs et d’autres personnes engagées dans les Eglises réformées en Suisse n’ont pas assumé leur devoir de défense des plus faibles et des plus vulnérables, affirme la Fédération des Eglises protestantes de Suisse (FEPS). Dans le but de lancer une réflexion et une recherche historique sur le sujet, la FEPS a organisé, le 21 mars 2016 à Berne, un colloque réunissant historiens et spécialistes politiques de la question.
“Il est important de faire la lumière sur ce qui s’est passé, car de nombreux enfants et jeunes adultes ont trop longtemps fait l’objet d’exploitation et de maltraitance alors que les autorités, l’Eglise et la société ont fermé les yeux”, affirme la FEPS dans un communiqué du 24 mars.
Pendant des décennies et jusqu’en 1981, en Suisse, des dizaines de milliers d’enfants, orphelins ou retirés à leurs familles considérées comme inaptes à les élever, ont été placés de force dans des familles d’accueil, en foyer, dans des institutions religieuses, voire en prison.
Maltraitance, exploitation, abus sexuels
En l’absence de structures socio-étatiques, des pasteurs ou d’autres personnes engagées dans l’Eglise ont souvent été amenés à assumer une fonction dans la prise en charge ou la surveillance d’enfants placés de force dans des familles ou des foyers. Même si plusieurs d’entre eux figurent parmi les personnes qui ont dénoncé le système, il est consternant de constater que d’autres n’ont pas assumé leur devoir de défense des plus faibles et des plus vulnérables, affirme la FEPS.
En effet, si les exemples positifs existent, notamment celui du pasteur Albert Wild qui a dénoncé les abus dans un livre publié en 1907 déjà, certains autres ministres ont eu un rôle moins reluisant, note la FEPS. Or les représentants du corps pastoral avaient une grande influence sur la société d’alors.
“Le scandale n’est pas qu’il y ait eu des placements extrafamiliaux, mais que la situation de nombreux enfants ait empiré après leur placement. Maltraitance, exploitation ou abus sexuels ont été le quotidien de beaucoup de victimes”, a résumé Thomas Huonker, docteur en histoire, devant la soixantaine de participants venus à Berne de toute la Suisse. Des membres des Eglises réformées, des scientifiques et d’anciennes victimes étaient notamment présents.
Reconnaître la souffrance des victimes
L’objectif du colloque est de lancer la réflexion et la recherche sur le rôle des Eglises réformées dans les pratiques de placements extrafamiliaux jusqu’en 1981. Il vise aussi à reconnaître la souffrance des victimes, leur réhabilitation et à ce que de tels faits ne se reproduisent plus. La FEPS souhaite par exemple que des approfondissements puissent être faits dans le cadre du programme du Fonds national de la recherche sur le sujet.
Les actes du colloque devraient paraître d’ici fin 2016. Ils réuniront les interventions des orateurs de la journée. L’ouvrage sera complété, notamment par d’autres articles scientifiques.
La FEPS participe, comme l’Eglise catholique en Suisse, a un fonds de solidarité pour les victimes de placements forcés, mise en place par la Confédération et qui doit être doté de 300 millions de francs. (cath.ch-apic/com/arch/rz)