Cet ancien pasteur évangélique, qui fonda une communauté pentecôtiste à Uppsala, interviendra aux JMJ de Cracovie en juillet.
De la megachurch à l’Église catholique,
de Ulf Ekman avec Henrik Lindell,
Cerf, 183 p., 14 €.
Visage énergique, regard ardent, Ulf Ekman, 66 ans, est peut-être le seul chrétien dont tous les Suédois connaissent le nom. Impossible d’ignorer ce pasteur chaleureux qui a publié plus d’une trentaine d’ouvrages spirituels à succès et qui avait fondé à Uppsala, en 1983, l’une des plus importantes communautés pentecôtistes européennes, « Livets Ord » (Parole de vie). Celle-ci rassemble un millier de communautés en Scandinavie, en Russie et dans le Caucase et concerne plus de 250 000 personnes à travers son réseau d’écoles bibliques, d’instituts de théologie et d’établissements scolaires privés.
C’est dire si l’annonce, le 9 mars 2014, de sa décision de devenir catholique a fait « l’effet d’une bombe », comme l’écrit le journaliste franco-suédois Henrik Lindell en avant-propos à son livre d’entretiens avec Ulf Ekman (1). Ce jour-là, tous les quotidiens nationaux et régionaux de Suède ont fait leur une sur cet événement.
Pour éviter la pression médiatique, la réception officielle dans l’Église catholique de l’ancien pasteur et de son épouse, le 31 mai 2014, s’est faite à Djursholm, près de Stokholm, dans la chapelle d’un couvent des brigittines, cet ordre monastique fondé au XIVe siècle par sainte Brigitte de Suède.
Un « besoin de la chair et du sang du Christ »
L’unique sainte suédoise – jusqu’à ce dimanche 5 juin, où sera canonisée la religieuse Élisabeth Hesselblad (1) – a joué un grand rôle dans la vie des Ekman. « Ma femme s’appelle Birgitta et son parcours vers le catholicisme a commencé avec sainte Brigitte… dont le mari s’appelait Ulf », raconte-t-il dans un sourire. Étudiant la vie de cette sainte à partir de 2003, le couple est amené à s’interroger sur la Vierge Marie, les sacrements, l’intercession des saints, la succession apostolique…
« Plus on approfondit sa compréhension théologique de l’Église, plus on a envie d’aller dans le sens d’une unité plus profonde qui est en réalité catholique », explique-t-il. À force de rencontrer des catholiques, il renoue avec la tradition de l’Église historique, celle qui était présente en Suède avant la Réforme, qui se répandit en Scandinavie à partir de 1520. Ses préjugés anticatholiques tombent les uns après les autres, lui qui, comme tout Scandinave, avait grandi dans un certain rejet culturel des Européens du Sud.
Parallèlement, il se sent de plus en plus attiré par l’Eucharistie, y percevant la présence réelle du Christ et n’hésitant pas à parler de son « besoin de la chair et du sang du Christ ». « Jésus et l’Église sont un. L’Esprit et l’Écriture se tiennent ensemble. Là est vraiment le dépôt de la foi », s’enthousiasme le pasteur converti, en citant l’apôtre Paul qui affirme que « la maison de Dieu est l’Église du Vivant, pilier et soutien de la Vérité » (1Tm 3,15).
Quinze années de questionnement
Au bout de quinze années d’intense questionnement sur ce qu’est l’Église, il apparaît évident à Ulf Ekman qu’il doit l’intégrer : « Comme lorsqu’on est devant la vitrine alléchante d’une pâtisserie, il faut bien y entrer si l’on veut déguster les gâteaux ! »
Depuis qu’il a pris sa retraite en 2014 et quitté l’équipe de direction de « Livets Ord », l’ancien pasteur profite de son temps libre pour visiter diverses réalités ecclésiales en Amérique du Nord, en Grande-Bretagne, en Pologne, en Italie… et même au Kazakhstan où il a été invité par l’archevêque d’Astana, après que son livre a été traduit en russe.
Depuis deux ans également, plusieurs pasteurs luthériens suédois, désemparés par les évolutions de leur église, viennent se confier à lui et s’enquérir des démarches pour intégrer l’Église catholique.
N’aspirant, pour le moment, ni au diaconat ni au sacerdoce, Ulf Ekman s’est rendu également plusieurs fois à Lourdes, lieu qu’il affectionne depuis qu’il y a reçu une « grâce de guérison » lors de sa première visite, en tant que protestant, en octobre 2013. Arrivé épuisé, au bord du burn-out, il entendit clairement un triple appel à se confesser (sans pouvoir recevoir l’absolution, en tant que protestant), à aller à la messe et à se plonger dans les piscines. Après ces trois étapes, il s’est senti « totalement guéri physiquement et encore plus profondément attiré vers l’Église catholique. Par Marie ». Un témoignage qu’il partagera largement cet été, aux JMJ à Cracovie.
(1) Née dans une famille luthérienne, Élisabeth Hesselblad (1870-1957) s’était convertie au catholicisme en 1902. Elle restaura l’ordre du Très-Saint – Sauveur fondé par sainte Brigitte. Elle a été déclarée Juste parmi les nations en 2004 pour avoir caché des juifs à Rome durant la Seconde Guerre mondiale.
Claire Lesegretain
la-Croix.com