Dans la presse internationale, l’Afrique du Sud s’alarme d’une recrudescence de pratiques superstitieuses. Le gouvernement vient d’ouvrir une enquête contre un pasteur qui aspergeait ses ouailles de pesticides, pour les guérir du sida et du cancer.
Lethebo Rabalago s’est même auto-proclamé prophète, et les gens assistent par centaines à ses cérémonies où on le voit brandir ce goupillon spécial, un aérosol rempli de pesticide de la marque Doom : efficace contre les moustiques et les insectes rampants. D’après ce leader de l’église de l’Assemblée générale du mont Zion, contre toutes sortes de maladie, une bonne rasade dans les yeux ou sur le visage peut vous guérir de tout notamment d’un glaucome, du sida ou même du cancer. Cela semble ridicule, et pourtant… L’affaire déclenche un vrai débat en Afrique du Sud où cohabitent un éventail exceptionnellement large de religions, plus ou moins imprégnées de pratiques traditionnelles avec des pasteurs à la fois, gourous et guérisseurs. “Dieu peut guérir de tout, soutient le pasteur à la télévision locale, il suffit d’y croire” et Il ne comprend absolument pas les raisons pour lesquelles on lui cherche des noises, pas plus que des milliers de personnes qui cherchent du réconfort auprès de ce genre de groupes religieux.
Ils sont de plus en plus nombreux ?
C’est vrai et comme ils accèdent aux médias, leur audience et leur crédibilité se renforce. Mais quand, l’an dernier, un pasteur a voulu nourrir ses fidèles avec, non pas du pain et du vin, mais avec du pétrole et un serpent, sensés se transformer en pain et chocolat dans la bouche des croyants, alors le gouvernement a décidé d’agir. Une commission a été créée pour enquêter sur ces cas. Mais son travail est difficile car son président l’a répété hier, elle ne peut pas punir les pasteurs puisque les gens sont consentants, ils veulent se faire asperger de pesticide. Ce qu’il faudrait c’est changer la loi pour réguler les croyances. exiger un certificat et un contrôle des pasteurs.
Mais on ne régule pas la foi ?
Non le concept passe très mal, partisans et opposants de cette commission s’affrontent, tandis que d’autres regardent en se disant que décidément, on passe à côté du sujet. Pourquoi une recrudescence de ces cas ? Les ONG ont une opinion. La médecine traditionnelle est très implantée en Afrique du Sud. 70% des gens, selon le ministère de la Santé, consulteraient un guérisseur. Et dans un pays aux inégalités criantes, où 45% de la population vit sous le seuil de pauvreté et qui a très longtemps vécu dans le déni du sida, on a nié pendant des années que la maladie pouvait même exister, toutes sortes de palliatifs se sont développés. Sept millions de Sud-Africains sont séropositifs aujourd’hui, et si les politiques ont changé et que les médicaments sont même proposés gratuitement depuis le mois dernier, les gourous guérisseurs ont eu le temps de s’installer et contre ces croyances, il sera très difficile de vraiment lutter.