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Le conflit est ancien et répandu : dans de nombreuses régions du monde, pasteurs et cultivateurs se disputent ou se sont disputé la terre. En Afrique, il est loin d’être éteint et, là où il existe, son acuité est souvent aggravée par le fait que ce sont des ethnies différentes qui pratiquent l’une et l’autre activité.
La sécheresse, cyclique ou liée au changement climatique, pousse les éleveurs nomades, à la recherche d’eau et de pâturages, de plus en plus tôt dans l’année vers le sud, où ils arrivent alors souvent à la période des récoltes. Ou plus loin vers le sud, où ils créent parfois des villages (en Côte d’Ivoire ou au Bénin, par exemple) et des problèmes de cohabitation, comme on en voit dans le nord-est du Congo-Kinshasa avec l’arrivée de Peuls Bororos ouest-africains ces dernières années…
L’établissement de frontières depuis les indépendances a réduit la marge de manœuvre des pasteurs. L’accroissement continu de la population diminue les espaces libres où les éleveurs trouvent la survie de leurs troupeaux; les couloirs de transhumance sont petit à petit transformés en champs. Le bétail est alors honni par les cultivateurs, qui lui reprochent de détruire leurs cultures et tuent des bêtes, s’attirant des représailles. Les uns et les autres se disputent l’accès aux puits, dont l’accès, traditionnel, est soudain empêché par la création de fermes et de champs. L’insécurité croissante modifie les itinéraires de transhumance.
Enfin, les gouvernements n’offrent souvent que peu – voire aucune – aide aux pasteurs, dont l’apport à un “développement durable” n’a été reconnu que depuis les années 90 par la communauté internationale. On notera, en revanche, les efforts du gouvernement rwandais post-génocide pour permettre le retour au pays sans heurts des pasteurs tutsis exilés dans les grands espaces tanzaniens depuis des décennies.
Pasteurs et guerriers
Dans certaines zones/périodes, pourtant, les deux métiers cohabitent – par ex. dans la région de Mopti (Mali) du XIVe siècle jusqu’à l’indépendance. Les cultivateurs accueillent les troupeaux en transhumance pour profiter du fumier et du lait offerts. Ils laissent le bétail manger les résidus de cultures après la récolte. Parfois, ils creusent même des puits en prévision de l’arrivée des pasteurs et leur préparent de quoi monter des cases temporaires. Mais quand la bonne entente se brise, pour une raison ou une autre – et elles sont nombreuses dans la période de changements que vit l’Afrique – les adversaires recourent à la force.