24.04.17 – Biens chers frères et sœurs,
Voilà que votre pasteur est atteint, comme on le dit d’une maladie, par l’âge de la retraite. La fête que vous avez organisée à l’occasion de mon départ était fort belle et m’a beaucoup touché. Toute la joie que j’ai eue auprès de vous et dont j’ai parlé, fut sincère. Et lorsque l’un de vous m’a demandé pourquoi je n’ai pas souhaité jouer les prolongations dans cette Église que j’ai servie huit ans durant et qui allait se retrouver sans berger, j’ai balbutié une réponse qui ne pouvait convaincre personne.
C’est pourquoi j’ose prendre le temps ici de m’expliquer. Une raison concentre toutes les autres: je suis épuisé! Et même, en toute franchise, vous m’avez épuisé! Vous et les postes que j’ai occupés précédemment.
J’ai été pasteur quarante ans et je suis usé comme si j’avais été mineur de fond. L’image n’est pas exagérée: toute ma vie, j’ai voulu extraire de vous le meilleur en plaidant la cause du Christ. J’ai été serviteur de Dieu et esclave de mes paroissiens. Alors que je rêvais de louer la magnificence du Seigneur, vous m’avez écrasé avec vos soucis, vos bobos, vos critiques, vos exigences, vos médisances et même vos surveillances. Parce que vous ne parveniez pas à être parfaits, vous avez mis en exergue toutes mes faiblesses et toutes mes failles. Parce que vous ne mettiez pas en pratique la Parole, vous avez pointé mes prédications contraignantes. Parce que vous doutiez de vous, vous avez dénigré mon engagement. Oui, moralement, vous m’avez laminé.
Les fleurs que vous avez offertes à ma femme ne lui feront pas oublier, par exemple, les quatre ans durant lesquels elle a réclamé que soit installé le double vitrage au presbytère vétuste, alors que la plupart d’entre vous construisiez de belles maisons. Ce détail témoigne de la mesure de votre considération à l’égard de votre berger et de sa famille. Et comment ne pas être blessé lorsque la trésorière m’a fait remarquer que j’avais le même salaire qu’un pasteur d’une grande Église alors que la nôtre ne comptait que 42 membres?
Tous ces coups absorbés, reçus de personnes qui prennent avec moi la Cène, je les aurais acceptés s’ils n’étaient que maladresse, mais ils sont le reflet de votre égoïsme et de votre indifférence. Je comprends alors pourquoi nos témoignages chrétiens suscitent si peu de conversions!
Vous allez penser que je suis amer, que je vis mal ma situation de nouveau retraité, que je suis atteint de ce burn-out qui frappe les pasteurs, que ce n’est pas acceptable de la part d’un serviteur de Dieu qui ne travaille qu’un week-end par semaine. Vous ne feriez alors que confirmer ce que j’ai toujours lu: de Moïse à Paul, sans oublier Jésus, les conducteurs du peuple ont été victimes d’un immense désamour de la part de ceux qu’ils voulaient éclairer. mais leur œuvre demeure! Je m’attache donc au fait que ce que j’ai semé a porté du fruit.
Pasteur A. Mer